port à ses cousins les singes, l’homme n’est qu’un type infantile. Cela se voit par la régression du système pileux, la longueur des membres postérieurs, la gracilité du squelette… Mais cette enfance prolongée a eu, comme résultat, à travers les siècles, le langage dû à la faiblesse du larynx, la supériorité intellectuelle opposée à l’infériorité physique. Finalement, cela a tourné à notre avantage. Comme quoi à quelque chose malheur est bon. Béni soit le tréponème. Si des générations d’idiots furent sacrifiés sur son autel, la race, survivante et adaptée, y a conquis des facultés nouvelles et précieuses. Ajoutez, à cela, l’alcool, le précieux alcool dont l’action s’est exercée souverainement sur la substance cérébrale. Et cela continue, mon pauvre monsieur. La syphilis et l’alcool sont les principaux facteurs du génie humain, et les bipèdes que nous sommes, vous et moi, n’apparaissent aux regards de l’observateur que les héritiers mal venus des singes.
Il s’arrête, croise ses bras sur sa poitrine et projette sur mon front un regard fauve où courent des lueurs bleues et jaunes. Je baisse la tête. Cette fois, je me l’avoue in petto, je suis knock-out. Une immonde et confuse image s’interpose entre Ugolin et moi : l’accouplement inimaginable d’une guenon et d’un tréponème monstrueux à plusieurs têtes. Je laisse tomber mes paupières.
— Écoutez, écoutez, éclate la voix d’Ugolin. Nous sommes sortis du troupeau des anthropoïdes. Mais l’homme de demain, le surhomme, l’être que nous contenons en puissance, doit sortir du troupeau de ses contemporains figés dans l’immobilité et incapables