Page:Méric - Le Crime des Vieux, 1927.djvu/24

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mois… Ou encore toutes les semaines… Ou chaque jour ?

Ces questions et ces répliques ont été échangées avec quelque âpreté ; elles se répercutent dans mon crâne, ainsi que le froissement rapide de deux épées.

Le professeur Sévart s’est tu un instant, paraissant méditer ; puis, les paupières baissées sur la double flamme qui s’allume dans ses yeux, il reprend d’une voix doucereuse :

— S’il en est ainsi, le Suprême Conseil doit se réunir au plus tôt. Ugolin ne peut abdiquer sans qu’on avise. Il faut prévoir le cas et…

Il scande ses paroles :

— Et désigner le successeur, celui qui doit prendre place dans la Trinité Scientifique.

Néer plante son regard glacial, acéré comme une lame, dans celui glissant, mobile, de son interlocuteur.

— Parbleu ! fait-il, je savais bien que tel serait votre avis.

— C’est aussi le vôtre ?

— Vous pensez donc qu’il faut choisir parmi les Douze ?

— Je le pense.

— Vous pensez qu’il faut compléter la trinité défaillante ?

— Je le pense.

Le silence persiste, impressionnant, autour de ces deux hommes dont nous connaissons, tous, la longue rivalité, jusqu’ici dissimulée, tempérée par l’autorité suprême d’Ugolin. Il a suffi d’un incident pour que ces deux esprits également puissants, au génie fertile et dévorant, cédassent aux impulsions de la haine. Car la haine les bouleverse et fait grincer leurs nerfs.