Page:Méric - Le Crime des Vieux, 1927.djvu/249

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les premiers, bousculés par les derniers qui, ne devinant rien, s’obstinaient à pousser. Ce fut une inexprimable confusion. Un officier, pâle de rage, se mit à hurler :

— Avancez !… avancez donc… tas de brutes.

Il s’élança lui-même ; mais il fit un bond en arrière, comme s’il venait de heurter quelque mur infranchissable et, lâchant son sabre, il demeura stupide, ne comprenant plus.

La terreur s’empara des soldats. Il y avait là, à soixante mètres de la maison, on ne savait quel obstacle qui s’opposait au passage. Un obstacle invisible, irréel, et pourtant certain, indéniable… Inutile de se heurter contre cette force surnaturelle. On ne pouvait rien. On ne passait pas. Le général, prévenu, se répandit en injures. Il tempêta, menaça, il vociféra :

— Faites donner l’artillerie.

Le bombardement commença.

Alors la surprise et l’effroi et une sorte de curiosité morbide rivèrent au sol tous les hommes qui se trouvaient là. Le phénomène qui s’accomplissait sous leurs yeux tenait de la fantasmagorie. Les premiers obus s’arrêtaient net à une soixante de mètres de la maison et, rebondissant comme des balles, retombaient inertes à quelques pas. Il y avait là encore quelque chose, — mais quoi ? — qui se dressait, qu’on ne voyait pas et qui renvoyait les engins meurtriers comme une raquette. Et les obus se succédaient sans effet, descendant mollement sur le sol. Les artilleurs s’exaspérèrent. Un déluge de marmites de tous calibres s’épuisa contre l’obstacle. Des avions firent leur apparition. Ils tournoyèrent sur la maison un instant, et lâchèrent leurs bom-