Page:Méric - Le Crime des Vieux, 1927.djvu/27

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— Il est condamné, n’est-ce pas ?

— Irrémédiablement. À moins que… Mais ce serait une méthode atroce… Oui, on pourrait… C’est le seul moyen qui nous reste.

Il fait quelques pas, soufflant bruyamment, hésitant ; puis, revenant vers moi :

— Comprenez-moi bien. On peut encore faire durer Ugolin. Mais l’opération classique est insuffisante. Ugolin est, aujourd’hui, comme un objet qui aurait besoin de réparations… Saisissez-vous ?… Il faut qu’on le répare… L’expérience que je vais tenter sera d’ordre anatomique.

Je le dévisage sans songer à lui cacher mon ahurissement. Qu’entend-il par son expérience anatomique ? Je sais quelle est la profondeur de son génie et à quelle résolution implacable peut l’entraîner la passion de la vérité scientifique. Rien ne compte pour lui quand il s’agit d’arracher un lambeau du mystère, d’enregistrer une nouvelle conquête sur l’inconnu.

Il n’a pas l’air, d’ailleurs, de se préoccuper de mon trouble. Il achève, tout à son idée :

— Anatomique… C’est bien cela… Ce qui faiblit chez Ugolin, ce qui faiblira en nous, c’est l’enveloppe. Il faut renouveler les muscles, greffer des membres jeunes à la place des membres usés, ayant fini leur temps. Pour tout dire, l’être humain doit être refait, par morceaux, au fur et à mesure des besoins. Tenez, j’ai tenté l’expérience sur des végétaux. J’ai obtenu des résultats inouïs. J’ai créé des types inédits, entièrement différents les uns des autres. Il n’est pas interdit de pratiquer les mêmes opérations sur l’animal humain…

Il respire avec force, tout en m’observant.