et le drame passionnel, que peut contenir un journal, sinon le compte rendu des séances de laboratoires, la nomenclature des recherches et découvertes nouvelles, les controverses entre savants, les hypothèses qui naissent et fuient sur la constitution du Monde ? Le livre est pire, d’une aridité décourageante. Et le théâtre ? Nous lui avons substitué les vastes cinéphones où les spectacles scientifiques seuls ont accès. Ugolin, un jour, a voulu risquer une expérience. Il a reconstitué un vaudeville d’antan, une de ces pièces qui, dans ma jeunesse, obtenaient de prodigieux succès et enrichissaient leurs auteurs. Cette production était signée d’un nommé Vermeil ou Verneuil, ou Vernouil, je ne sais plus, un très habile faiseur. Eh ! bien ! les neutrides n’ont cessé de bâiller, ne saisissant rien aux finesses et aux jeux subtils qui récoltaient des tempêtes d’applaudissements, voici plus d’un siècle. Quel chahut dans nos mœurs et dans nos goûts ! Il n’y a plus de théâtre possible, ni d’écran, ni de stars orgueilleuses, ni de Célimènes fastueuses, ni d’ingénues roublardes, ni de grands comédiens en rupture de pensionnat, ni de joyeux scandales… Illustres vedettes, tartes à miel des scribouilleurs dans le marasme, qu’êtes-vous devenues ?
— Tout est fini, dit Judith, comme si elle flairait mes réflexions, tout des plaisirs de nos pères. Vous avez édifié le siècle de l’eugénisme, du dressage humain. Il vous faut de la pureté dans le corps et dans l’esprit. Une couche de glace sur les passions et sur les vices. Vous n’êtes qu’une humanité conservée dans un appareil frigorifique.