Page:Méric - Le Crime des Vieux, 1927.djvu/30

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Néer n’écoute plus. Il lève, dans un aveu d’impuissance, ses deux bras désespérés vers le ciel. Il a, pour ce ciel d’un bleu tendre où les oiseaux, peu soucieux d’éternité, se pourchassent amoureusement, un regard chargé d’imprécations.



Ai-je dit que ma maison, enfouie dans la verdure où elle se chauffe comme un lézard sous les baisers du soleil, est perchée sur la colline de Meudon ? De la terrasse, on entrevoit le ruban vert de la Seine qui roule ses eaux, fastidieusement, entraînant tout son monde d’êtres vivants, agissant, bataillant, selon l’éternelle volonté ? Cette maison, je l’ai modifiée à peine au cours des ans, sans vouloir jamais l’abandonner, tant elle sue de récurrences ineffaçables. Car c’est là que je comparus, désemparé et pantelant, là devant le tribunal d’Ugolin, alors que j’étais encore un vieux jeune. C’est là que j’ai voulu vivre et que je vais peut-être mourir… Quel silence mielleux et sonore, parfumé de bruits roses ! Une infinie douceur lèche mes os, court au long de mes nerfs. Peu à peu le calme redescend en moi.

Après tout !… Mourir !…

Judith m’attend, Judith, c’est l’épouse et la confidente, mais, obscurément, je sens que c’est aussi l’ennemie. Tout le génie d’Ugolin s’est épuisé à vouloir supprimer le heurt des sexes. Il a, seulement, tué l’Amour. L’Amour, au sens où nous l’entendions, nous les barbares du vingtième siècle, l’Amour passion, l’Amour folie, l’Amour sottise, compliqué de jalousie