Page:Mérimée, Lettres à une inconnue 1,1874.djvu/286

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peu diversion aux tribulations que j’y éprouvais. J’étais fort empêché à plonger dans le désespoir quatre mille de mes concitoyens qui m’envoyaient des députations et nie faisaient des discours fabuleux.

Entre mon devoir et ma sensibilité naturelle, j’étais fort malheureux. Enfin, j’ai pris le parti le plus sage, et j’ai tranché du proconsul. D’ici à un an, je n’oserais pas repasser à Saintes. Je vois avec plaisir que vous vous souvenez de Paris à D… J’avais craint que vous n’eussiez oublié nos bois et nos gazons émaillés. Pour moi, j’y pense toujours plus vivement, surtout à présent que je viens de faire un pas vers Paris. Suivant toute apparence, je vous y précéderai. J’y serai dans dix jours au plus tard, à moins d’accidents que je ne puis prévoir. Et vous ? voilà le plus important. Être à Paris sans vous me semblera bien plus dur que de courir les champs comme je fais à présent. J’ai une soif de vous voir que vous ne pouvez comprendre. Pourrez-vous, voudrez-vous revenir pour dire adieu à vos domaines de la rive gauche ? je cherche à n’y pas penser, mais je n’y puis réussir. Pour me préparer aux