Page:Mérimée, Lettres à une inconnue 2,1874.djvu/173

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rien, que je n’ai pas le temps d’écrire. Enfin, nous partons tous ce soir, et je serai à Paris quand vous recevrez cette lettre. Nous avons eu mardi une assez bonne cérémonie, très-semblable à celle du Bourgeois gentilhomme. C’était le plus drôle de spectacle du monde que cette vingtaine d’hommes noirs très-semblables à des singes, habillés de brocart d’or et ayant des bas blancs et des souliers vernis, le sabre au côté, tous à plat ventre et rampant sur les genoux et les coudes le long de la galerie de Henri II, ayant tous le nez à la hauteur du… dos de celui qui le précédait. Si vous avez vu sur le pont Neuf l’enseigne : Au bonjour des chiens, vous vous ferez une idée de la scène. Le premier ambassadeur avait la plus forte besogne. Il avait un chapeau de feutre brodé d’or qui dansait sur sa tête à chaque mouvement, et, de plus, il tenait entre ses mains un bol d’or en filigrane, contenant deux boîtes, qui contenaient chacune une lettre de Leurs Majestés Siamoises. Les lettres étaient dans des bourses de soie mêlée d’or, et tout cela très-coquet. Après avoir remis les lettres, lorsqu’il a fallu revenir en arrière, la confusion s’est mise dans l’ambassade. C’étaient