Page:Mérimée, Lettres à une inconnue 2,1874.djvu/238

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jusqu’à l’appétit. On n’est jamais moins de deux heures et demie à table, et, si on ajoute la demi-heure que les hommes laissent aux femmes pour dire du mal d’eux, il est toujours onze heures quand on retourne au salon. Ce ne serait que demi-mal si on mangeait tout le temps ; mais, à l’exception du mouton rôti, je ne trouve rien à mon goût.

Les grands hommes m’ont paru un peu vieillis depuis ma dernière visite. Lord Palmerston a renoncé à son râtelier, ce qui le change beaucoup. Il a conservé ses favoris et a l’air d’un gorille en gaieté. Lord Russell a l’air de moins bonne humeur. Les grandes beautés de la saison sont parties, mais on n’en faisait pas grand éloge. Les toilettes m’ont paru, comme toujours, très-médiocres et chiffonnées ; mais rien ne résiste à l’air de ce pays-ci. Ma gorge en est la preuve. Je suis enroué comme un loup et je respire très-mal. Je pense que vous devez avoir moins chaud que nous et que les bains de mer doivent vous donner de l’appétit. Je commence à m’ennuyer de Londres et des Anglais. Je serai de retour à Paris avant le 25. Et vous ? J’ai lu un livre assez amusant :