Page:Mérimée, Lettres à une inconnue 2,1874.djvu/356

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Votre charité en a été facilement quitte. Mais cela ne compte pas ; d’ailleurs, je suis un peu mieux ; j’aurais besoin de vous pour me mener à l’Exposition, où je ne voudrais pas voir des croûtes et des nudités. — Vous serez mon guide. Vous souvenez-vous du temps où j’étais le vôtre ? — Dites-moi quel jour vous conviendra. Adieu, chère amie.

CCCXIX

Paris, samedi 12 juin 1869.

Chère amie, ce temps sombre avec des alternatives de chaud et de froid me désole et me fait grand mal ; aussi je suis d’une humeur de chien. Le tapage qui se fait tous les soirs sur les boulevards, et qui rappelle les beaux temps de 1848, ne contribue pas peu à m’attrister et à faire que, comme Hamlet, man delights me not nor woman neither.

Ce qui m’afflige le plus dans toutes ces tristes affaires, c’est la profonde bêtise. Ce peuple, qui se dit et se croit le plus spirituel de la terre,