Page:Mérimée - Carmen.djvu/21

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avec moi. Sa présence même était une protection assurée contre toute mauvaise rencontre. D’ailleurs, j’étais bien aise de savoir ce que c’est qu’un brigand. On n’en voit pas tous les jours, et il y a un certain charme à se trouver auprès d’un être dangereux, surtout lorsqu’on le sent doux et apprivoisé.

J’espérais amener par degrés l’inconnu à me faire des confidences, et, malgré les clignements d’yeux de mon guide, je mis la conversation sur les voleurs de grand chemin. Bien entendu que j’en parlai avec respect. Il y avait alors en Andalousie un fameux bandit nommé José-Maria, dont les exploits étaient dans toutes les bouches. — Si j’étais à côté de José-Maria ? me disais-je… Je racontai les histoires que je savais de ce héros, toutes à sa louange d’ailleurs, et j’exprimai hautement mon admiration pour sa bravoure et sa générosité.

— José-Maria n’est qu’un drôle, dit froidement l’étranger.

— Se rend-il justice, ou bien est-ce excès de modestie de sa part ? me demandai-je mentalement ; car à force de considérer mon compagnon, j’étais parvenu à lui appliquer le signalement de José-Maria, que j’avais lu affiché aux portes de mainte ville d’Andalou-