Page:Mérimée - Carmen.djvu/225

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obtenir un poste convenable. — Hélas ! madame, j’aurais tant de regret à quitter ce village !… Le curé de Sainte-Marie est mort… mais ce qui me rassure, c’est qu’il sera remplacé par l’abbé Raton. C’est un bien digne prêtre, et je m’en réjouis ; car si monseigneur avait pensé à moi…

— Le curé de Sainte-Marie est mort ! m’écriai-je. Je vais aujourd’hui à N***, voir mon oncle.

— Ah ! madame, n’en faites rien. L’abbé Raton est bien plus digne que moi ; et puis, quitter Noirmoutiers !…

— Monsieur l’abbé, dis-je d’un ton ferme, il le faut ! À ce mot, il baissa la tête et n’osa plus résister. Je revins presque en courant au château. Il me suivait à deux pas en arrière, le pauvre homme, si troublé, qu’il n’osait pas ouvrir la bouche. Il était anéanti. Je n’ai pas perdu une minute. À huit heures, j’étais chez mon oncle. Je l’ai trouvé fort prévenu pour son Raton ; mais il m’aime, et je sais mon pouvoir. Enfin, après de longs débats, j’ai obtenu ce que je voulais. Le Raton est évincé, et l’abbé Aubain est curé de Sainte-Marie. Depuis deux jours il est à la ville. Le pauvre homme a compris mon : Il le faut. Il m’a remercié gravement, et n’a parlé que de sa reconnaissance. Je lui ai su gré de