Aller au contenu

Page:Mérimée - Carmen.djvu/301

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

ALEKO.

J’ai rêvé de toi. Il me semblait qu’entre nous… J’ai fait un rêve horrible.

ZEMFIRA.

Menteries que ces rêves-là. N’y crois pas.

ALEKO.

Ah ! je ne crois à rien, ni aux rêves, ni aux doux serments, non plus même à ton cœur.


LE VIEILLARD.

Pourquoi, jeune insensé, soupirer toujours ? Ici les hommes sont libres, le ciel est serein, et les femmes se vantent de leur beauté. Ne pleure pas. Le chagrin te tuera.

ALEKO.

Père ! Elle ne m’aime plus !

LE VIEILLARD.

Console-toi, ami. C’est un enfant. Ta mélancolie n’a pas de raison. Aimer, pour toi c’est amertume et douleur. Aimer, c’est un jeu pour un cœur de femme. Regarde : sous cette voûte là-haut, la lune erre en liberté. À toute la nature, tour à tour, elle verse sa lumière. Elle entrevoit un nuage : soudain elle l’éclaire,