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Page:Mérimée - Théâtre de Clara Gazul, 1857.djvu/178

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me vengerait mieux que la flamme d’un auto-da-fé…car je ne veux pas ta mort… Mais qu’ai-je fait ?… Peut-être me suis-je déjà trop vengée… j’ai trahi son secret. — Et n’a-t-il pas trahi l’amour le plus tendre ? — Mais Fray Bartolomé est affilié à la sainte inquisition… son zèle est trop ardent… il va le dénoncer sans doute… On le mettra à la torture, on le fera brûler. — J’en serai cause… On dira que je l’ai fait mourir parce que je ne suis pas assez belle pour le retenir… Oh ! Bélisa ! Bélisa ! tu es ma seule ennemie ! tu dois payer pour lui !… Pablo, je ne veux pas ta mort !… non, je ne veux pas ta mort !… Je te sauverai. Il fuira loin de ce pays… il quittera Bélisa… son amour… il sera bien malheureux… il verra ce qu’on gagne à… Et Bélisa… Oh ! je me vengerai… Lauretta, du papier, de l’encre, et que mon écuyer se tienne prêt !

Elle sort.

Scène II.

Prison de l’Inquisition.
DON PABLO seul, assis devant une petite table.

Les gredins, parce que nous sommes en carême, veulent que je fasse maigre à mon dernier dîner ! Et leur merluche est dure comme cinq cents diables !

Entre doña Urraca.

Oh ! oh ! corps du Christ ! Urraca en personne. Les femmes et l’argent entrent partout. — Eh ! bonjour donc, mon aimable amie. Quel dieu, ou quel diable, t’amène dans mes bras ?

Doña Urraca froidement. Don Pablo, on dit que vous êtes condamné à mort ?

Don Pablo. Nonobstant le carême.

Doña Urraca. Mais vous pouvez encore vous sauver.

Don Pablo. En dénonçant l’ami avec qui j’ai travaillé ? — Jamais !

Doña Urraca. Non. Si vous vouliez vous séparer de l’impiété, faire pénitence publique… et entrer dans un couvent… à cette condition, j’obtiendrais votre grâce.