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Page:Mérimée - Théâtre de Clara Gazul, 1857.djvu/180

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Àgustin de m’avoir vendu, car il savait que j’étais l’auteur du pamphlet. Il a eu peur et s’est hâté de dénoncer son complice, pour que le soupçon ne tombât pas sur lui. Mais cependant je ne dirai jamais ce que je sais sur son compte.

Doña Urraca. Oui, vous avez de l’honneur avec les hommes ; mais avec les femmes ?

Don Pablo. Depuis le temps que je vous connais, vous ai-je fait une infidélité ?

Doña Urraca ironiquement. Non, pas une !

Don Pablo. D’honneur, pas une.

Doña Urraca de même. Courage !

Don Pablo. Qu’avez-vous donc à sourire ?

Doña Urraca. Je ris en pensant à tous les tourments que tu vas souffrir en enfer pour tes parjures.

Don Pablo. Étrange jalousie ! Je vous jure sur mon honneur…

Doña Urraca. Tais-toi, misérable ! regarde ce portrait ; à qui l’as-tu donné ?

Don Pablo. Urraca, combien y a-t-il que je vous connais ?…

Doña Urraca. tu te vois confondu, homme d’honneur !

Don Pablo. Il y à deux ans. La première fois que je vous vis, je venais de passer de l’école de Ségovie dans les carabiniers ; vous rappelez-vous mon uniforme tout neuf qui m’attira des compliments de votre part ? — Or, je vous prie, regardez ce portrait ; quel en est l’uniforme ?

Doña Urraca. Dieu ! celui de Ségovie !… Don Pablo (Elle se jette dans ses bras.)

Don Pablo. Ah, ah, ah ! la vieille Bélisa, que j’ai quittée pour toi, aura voulu te jouer un tour. Elle est méchante comme toutes les vieilles ! Il y a plus de trois ans que ce portrait est fait.

Doña Urraca. Pardonne-moi… cher ami ! Je suis une misérable… je mérite la mort… tue-moi !

Don Pablo. Comment ! nous sommes meilleurs amis que devant. Qui n’est pas jaloux, n’aime point.

Doña Urraca. Malheureux ! si tu savais qui t’a dénoncé ! — C’est moi.

Don Pablo. Toi !