Page:Méry - Les Nuits d'Orient, contes nocturnes, 1854.djvu/54

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

s’embraser aux feux de notre artillerie, et de nous transporter au centre de Paris de 1799.

Le théâtre du Grand-Opéra est en-fête. On y joue Adrien, de Méhul : le succès monte aux nues ; tous les connaisseurs et les critiques s’accordent pour dire qu’Adrien est le chef-d’œuvre des grands opéras, et qu’il traversera les siècles, toujours chanté, d’âge en âge, par les hautes-contre de la postérité. Adrien est monté avec un luxe inouï et le concours de tous les talents dramatiques du jour. Lainez, le grand Lainez chevrote avec une énergie admirable le rôle d’Adrien ; Dufresne joue le consul Flaminius ; Moreau joue Rutile, tribun militaire ; Laforêt joue Cosroës, roi des Parthes. La célèbre Maillard chante le rôle de Sabine. Au ballet du 3e acte, Vestris, le Dieu de la danse, exécute un pas de deux avec la citoyenne Gardel. Les citoyennes Clotilde, Saulnier, Chevigny, Chameroy, Pérignon, complètent l’ensemble du ballet. Dans un entr’acte, on doit applaudir Rode et Garat.

Au foyer des artistes, Mallet-Dupan, citoyen de Genève ; le poëte Saint-Ange, qui traduit Ovide ; Ducray-Duminil, le plus illustre des romanciers connus, et Clairval, chanteur au Théâtre-Italien, entourent Hoffmann, l’auteur du libretto d’Adrien.

— Es-tu bien sûr qu’Adrien soit allé en guerre chez les Parthes, mon cher Hoffmann demanda le poëte Saint-Ange.

— Sûr comme si je l’avais vu, dit Hoffmann, avec un bégaiement très-prolongé ; Adrien a fait la guerre partout.

— Excepté chez Cosroës, roi des Parthes, dit Saint-Ange.

— Eh bien ! reprit Hoffmann, de quoi te mêles-tu ? Va tra-