Dans l’Arménie turque et surtout dans le bassin du Tigre, nous avons vu fréquemment remplacer le pilau par le bourghoul. Le bourghoul est apprêté de la même façon que le pilau, sauf que l’on y emploie, au lieu de riz, du blé, échaudé au préalable et décortiqué dans un mortier avec un gros pilon de bois. Le kebâb ou grillade de mouton accompagne ordinairement le pilau. La viande, coupée en petits morceaux, est enfilée dans de longues brochettes et grillée au feu. Parfois le mouton est rôti en entier ; mais il est rare que ce mets soit convenablement apprêté ; certaines parties sont complètement carbonisées, tandis que d’autres restent à moitié crues.
Les moutons, aussi bien de Perse que d’Arménie, sont excellents. Leur chair est délicate et le manger presque quotidien de cette viande fatigue moins l’estomac que ne fait l’usage du bœuf dans nos pays. Ces moutons se distinguent par leur queue énorme, ou plutôt par une poche de graisse dans laquelle leur queue est noyée ; ce sac de graisse pèse souvent de 10 à 12 kilos[1].
La perdrix choukâr est aussi très abondante et très estimée. Elle est beaucoup plus grosse que la perdrix de nos pays, et sa chair est fort délicate. Le poulet enfin entre pour beaucoup dans la consommation ordinaire ; mais il ne vaut pas celui d’Europe, et l’on s’en fatigue encore plus vite.
Le yoghourt est une préparation de lait aigre des plus agréables. Après avoir cuit le lait, on y met, lorsqu’il est encore tiède, une petite quantité de ferment qui le fait prendre en lui donnant une légère saveur acide. En été c’est un des aliments les plus sains, et il n’est pas de maison si pauvre qui ne puisse en offrir. Le kaymak est une sorte de fromage dans lequel entre une grande quantité d’herbes odoriférantes ; on ne peut le donner pour un manger délicat.
- ↑ On peut avoir un beau mouton pour trois manètes (1 manète vaut 3 krans 10 shaï). Dans la montagne on a ce même mouton pour 25 piastres, à peu près 6 francs.