privilèges, il faut donc qu’ils passent dans le corps religieux des
Arméniens catholiques. Or, si les Pères sont seuls à Van, sans un
représentant du Patriarche arménien catholique qui reçoive en
son nom les abjurations des schismatiques, les prosélytes des
missionnaires perdront aux yeux des Turcs leur qualité d’Arméniens. Ils n’appartiendront plus à aucune corporation privilégiée ;
ils deviendront de pauvres Chrétiens sans défense, exposés aux
avanies aussi bien des Musulmans que des Schismatiques irrités.
Perdus au fond de l’Arménie, ils n’auront à espérer l’appui
Melcon, domestique de la mission de Van.
d’aucun représentant politique d’une nation catholique. Les Pères se
trouvent donc impuissants à commencer leur
œuvre auprès des Arméniens. Les moments
les plus favorables ont
été perdus ; des mouvements de retour,
franchement accentués,
n’ont point abouti, et
cela uniquement par le
manque d’un prêtre arménien. Hélas en Orient, plus encore qu’en Occident, les plus
grandes œuvres échouent souvent devant une question de détail ;
et c’est pour une question de l’ordre le plus infime que les Pères
n’arrivent pas à obtenir ce prêtre.
Surveillés dans toutes leurs démarches, entravés ainsi dans toutes leurs entreprises, séquestrés pour ainsi dire dans leur maison sans pouvoir presque en sortir, soumis jusque dans ce dernier asile à des perquisitions et à des vexations odieuses, les Pères ont enfin vu un jour leurs noms inscrits sur des listes de proscriptions. Ils n’ont échappé à ce dernier malheur que par une vraie merveille.