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DE VAN À AGANTZ

Russes en partie de plaisir et la dépouilla ; une dame à laquelle on avait ainsi enlevé de très riches bijoux, pleure amèrement. « Comment donc, s’écrie Kérim, je ferais pleurer des femmes ! », et il fait restituer les bijoux à l’élégante éplorée !

Kérim a des amis partout ; les uns le craignent, beaucoup l’aiment ; tous l’admirent. Sa tête est mise à prix depuis des années, mais il s’en moque ; c’est un demi-dieu et la trahison aura seule raison de lui.

Bientôt après avoir pris congé de M. Koloubakine, nous retrouvons les bords du lac que nous avions quittés depuis Van. Le lac forme ici un golfe profond et gracieusement encadré, que l’on nomme généralement lac d’Ardjîch.

Le village arménien de Mérik (ou Merek), que nous atteignons vers le soir, est pittoresquement construit sur le flanc d’une colline que domine une vieille église très fréquentée comme lieu de pèlerinage[1].

Le chef du village nous donne l’hospitalité dans sa demeure où nous occupons une bonne chambre assez grande et suffisamment isolée de l’écurie.


23 Novembre
Départ 7 h. 30 matin

En quittant Mérik, nous nous rapprochons du lac par un sentier que la glace transforme en un abominable casse-cou. Plus nous avançons, plus le « lac d’Ardjîch » devient beau. À l’œil il forme, non plus un golfe du lac de Van, mais un lac à part que le Sipan-Dagh ferme admirablement à l’Ouest, de sa masse imposante. Il est difficile d’imaginer une plus grandiose solitude que celle de ce lac bleu avec sa ceinture de montagnes blanches où se joue le soleil ; on s’y sent vraiment seul à seul avec Dieu, et il semble que cette austère nature vous grandisse et vous élève.

Arrivés au fond du golfe d’Ardjîch, nous laissons le bagage gagner directement Karakhân et obliquons à l’Est pour visiter le

  1. Texier donne comme altitude de Mérik 1712m,7. La moyenne de nos baromètres (2 observations) donnerait 1850m. Texier confond l’église de Mérik avec le monastère du mont Varak (ii, 5).