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Page:Maël - Une française au pôle Nord, 1900.djvu/139

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une banquette de trois bons milles en largeur, chose tout à fait inouïe pour la saison.

L’impression de lassitude et de crainte superstitieuse reparut le 12. On avait stationné au pied de la falaise au delà du terme convenu avec l’escouade d’exploration, et depuis vingt-quatre heures on aurait dû avoir de ses nouvelles. Du navire il était impossible d’explorer la côte, beaucoup trop élevée, mais ce qui n’était pas possible aux navigateurs l’était aux piétons. Rien ne les empêchait de communiquer au moyen d’armes à feu et de signaler leur présence en ces parages désolés.

L’inquiétude parvint au paroxysme le 13. L’escouade n’avait pas reparu, et, à bord, tout le monde était rempli d’épouvante. L’escouade devait être à bout de vivres, et il n’existait pas un moyen de lui porter secours.

Qu’allait-on faire ?

Un conseil fut tenu parmi les officiers. On y admit les premiers et seconds maîtres. Telle était l’angoisse universelle que le second maître Riez ouvrit l’avis de revenir en arrière. Chose étrange, sauf Lacrosse et d’Ermont, nul n’osa contredire à cette opinion.

Et ce qui encouragea cette velléité de retraite, ce fut l’annonce par la vigie que d’énormes débaris étaient en vue.

Le commandant Lacrosse, la mort dans l’âme, allait donner des ordres nécessaires à ce mouvement en arrière, lorsque Isabelle de Kéralio entra dans la chambre du conseil.

On avait pris l’habitude de parler ouvertement devant elle, et de ne lui rien celer des résolutions qu’on pouvait prendre. En quelques mots embarrassés, Bernard Lacrosse