Eliasar et Heresa écarquillaient les yeux et se regardaient sans plus s’occuper de leurs compagnons.
Alors Krühl se leva et se mit à battre les cactus avec sa canne, courant de droite à gauche, la figure baissée vers le sol, allant et venant ainsi qu’un chien de chasse qui met le nez sur une piste et s’apprête à donner de la voix.
― En voici encore une ! hurla-t-il en brandissant une deuxième boîte à sardines au bout de sa canne.
Eliasar et le capitaine s’élancèrent à sa suite. Peter Lâffe et Conrad suivirent le mouvement sans trop comprendre en quoi la découverte de ces récipients pouvait influencer l’état moral de l’état-major du brick-goélette.
Derrière une touffe d’agaves qui dressait vers le ciel leurs feuilles en lames de sabre, Eliasar mit le pied sur une demi-douzaine de boîtes qui portaient la même estampille commerciale, à moitié enfouies dans la terre molle. Celles-ci paraissaient avoir été ouvertes plus récemment, car le papier enluminé qui les recouvrait adhérait encore au fer blanc.
― C’est tout un bataillon qui a campé ici, dit Samuel Eliasar, tenez, tenez, Krühl, à votre droite, en voici encore une bonne douzaine. Nous avons mis le pied sur une île déserte pour repas de noces de cinq cents couverts.
― Bouh ! Bouh ! peuh ! grognait Krühl.