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LE CHANT DE L’ÉQUIPAGE

En avançant, les cinq explorateurs découvrirent des boîtes et encore des boîtes. Un énigmatique personnage semblait avoir pris à tâche de semer ces boîtes derrière lui, tel le Petit Poucet semant les cailloux blancs dans la forêt tragique, afin de retrouver sa route.

― Suivons le chemin que nous tracent ces boîtes, opina Krühl, nous découvrirons toujours quelque chose qui nous expliquera la présence du propriétaire de ces richesses comestibles. Je n’ai qu’une peur, mes pauvres gars, c’est que nous nous trouvions en présence de la cage vide du bel oiseau qui l’habitait.

― Hypothèse écœurante, répondit Eliasar.

Les cinq hommes déployés en éventail s’avançaient les yeux baissés, cherchant les jalons imprévus qui devaient les conduire vers une solution que leur imagination redoutait.

Ils escaladèrent ainsi une petite colline aride d’où l’on dominait la grève qui ourlait d’une bande d’or la côte ouest de l’île, c’est-à-dire la côte opposée à celle où se trouvait la crique servant de havre au petit navire.

Au sommet de cette colline, des blocs de rochers entassés les uns sur les autres par suite d’un tremblement de terre formaient une manière de monument qui tenait à la fois du fortin, des Pyramides d’Égypte et de la sauvagerie solennelle d’un temple bâti par des nègres anthropophages, dans une crise de sentimentalité.