Page:Mac Orlan - Le Chant de l’équipage.djvu/30

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Un « mia » enroué révéla la présence du chat dans l’escalier de la cave.

― Tu l’as encore enfermé exprès !

Krühl ouvrit la porte et le chat noir sortit lentement, la queue perpendiculaire au sol Il se frotta l’échine le long du comptoir.

― Viens, mon poulet, fit Krühl.

Il gratta la tête de Rackam qui, les yeux clos, commença à ronronner en se collant contre les jambes de son maître.

― Ces messieurs sont servis.

Pointe et Krühl se hâtèrent vers leurs places. Les heures de repas leur apparaissaient comme des heures d’élite. La fin du repas particulièrement, à leur avis, valait la peine d’être vécue deux fois par jour. En prenant le café, le tabac fumé dans la pipe se révélait supérieur. On ébauchait des projets d’avenir, toujours des projets. Krühl évoquait un monde disparu, plein de terreurs.

Mme  Plœdac et Adrienne formaient un auditoire de fortune.

Quelquefois Krühl prenait un livre, l’ouvrait avec respect, cherchait un passage et lisait à haute voix une étrange histoire, remplie de coups de couteau, de pièces de huit, de jurons vieillots, de créoles diaboliques, de soleil et d’or, d’étoffes somptueuses et de malédictions.

Les Bretonnes se signaient quand venait le