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IV

LA LANDE ET MARIE DU FAOUËT


Sam Eliasar, ou le solitaire malgré lui, errait de son côté à l’aventure, entrant chez Marie-Anne alors que Krühl en sortait et se faisant ouvrir des huîtres chez Boutron au moment même où M. Krühl venait de s’en aller.

Il portait lui aussi le chandail à col roulé. Son éternelle cigarette aux lèvres, il s’adaptait à merveille l’air las et désabusé qui était en quelque sorte l’impôt que la lande mélancolique exigeait de ses admirateurs civilisés.

― Il est très gentil, ce M. Krühl, disait-il à Marie-Anne méfiante.

― Il ne connaît pas sa fortune, répondait-elle.

― Et il habite toujours ici ?

― D’un bout de l’année à l’autre.

― Ah ! bien, permettez-moi de vous dire que si j’avais la fortune de M. Krühl, je n’habiterais pas ici toute l’année. L’été je ne dis pas, mais l’hiver c’est triste.