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LE CHANT DE L’ÉQUIPAGE

les rayons d’un lit sculpté transformé en bibliothèque.

― Quand m’achetez-vous mon lit ? demanda Mme Gadec en souriant.

― Quand je me marierai.

― Faut vous marier, faut vous marier, monsieur Krühl.

― Ah ! trouvez-moi une héritière.

― Vous êtes bien assez riche pour deux.

Tout en bavardant, Krühl et Eliasar examinaient les livres, des romans modernes défraîchis, des livres anciens dépareillés, des ouvrages religieux, toute une collection de Fantômas disloqués.

― Vous n’avez pas grand’chose.

― Ah ! j’en ai pourtant encore acheté la semaine dernière, un tas de vieilleries. Ce n’est pas bien intéressant.

― Non, dit Krühl, ou du moins ce n’est pas intéressant pour moi.

Eliasar, de son côté, éternuait dans la poussière que soulevaient les livres déplacés.

D’un coin obscur, hanté par les araignées et les cloportes, il sortit un petit volume relié en parchemin jaune ; il le frappa contre le bois de la bibliothèque pour en extraire la poussière.

― Qu’est-ce que c’est ? dit Krühl, machinalement.

― Oh ! je ne sais, pas grand’chose, un vieux bouquin comme il en pleut sur les quais de Paris.