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VII

LE DOCUMENT


Krühl, devant Eliasar qui bâillait distraitement, étala le fameux petit bouquin sur sa grande table de travail.

― Savez-vous, mon cher Samuel, ce que peut valoir ce modeste volume relié en peau de porc ?

― Ma foi non.

― Peut-être une quarantaine de millions, déclara Krühl lentement, afin de ménager son effet.

― Je regrette alors de vous l’avoir laissé acheter, répondit Eliasar en plaisantant.

― Bouh ! bouh ! peuh ! mon camarade, vous ne perdrez rien. Il est bien entendu que c’est à vous que revient la bonne fortune d’avoir découvert ce précieux document.

― Hasard ! hasard ! chantonna Samuel très condescendant, les jambes allongées sous la table et les poings enfoncés dans les poches de son pantalon.

― Évidemment, fit Krühl. Puis gravement :

« Le hasard vous a désigné, voilà tout. »