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Page:Machado de Assis - Mémoires posthumes de Bras Cubas.djvu/294

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— Toute ma destinée est dans cette petite main, lui dis-je. Tu en es responsable. Agis comme tu jugeras devoir le faire.

Virgilia fit un geste de désespoir. J’allai m’accouder à une console en face d’elle, et nous nous tûmes pendant quelques instants. On n’entendait que l’aboiement d’un chien, et je crois aussi la rumeur de l’eau qui venait mourir sur la plage. Comme elle continuait à se taire, je la regardai. Elle tenait les yeux baissés, fixes, amortis, et ses mains étaient croisées sur ses genoux, dans une attitude de suprême angoisse. Dans toute autre occasion, je me serais jeté à ses pieds, pour lui prodiguer mes raisonnements et ma tendresse. Mais cette fois, il fallait la résoudre à l’effort, au sacrifice, à la responsabilité de notre vie commune, et par conséquent l’abandonner à elle-même. C’est ce que je fis.

— Je le répète, dis-je, notre bonheur est entre tes mains.

Virgilia voulut me retenir, mais j’avais déjà franchi la porte. J’entendis encore un bruit de sanglots, et j’avoue que je fus sur le point de revenir, pour essuyer ses larmes sous mes baisers. Mais je me dominai, et je partis.