Aller au contenu

Page:Machado de Assis - Quelques contes.djvu/101

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Elle se leva, alla prendre le vase qui se trouvait sur le dressoir, puis le remit à la même place ; elle marcha jusqu’à la porte, s’arrêta, revint, sans plan apparent. Elle s’assit encore, pendant cinq ou dix minutes. Soudain, elle se rappela qu’Ignace avait peu mangé au déjeuner ; qu’il avait l’air abattu. Elle pensa qu’il était peut-être malade, très malade, qui sait !

Elle sortit de la pièce, traversa rapidement le corridor, et alla jusqu’à la chambre du jeune homme, dont la porte était entre-bâillée. Dona Severina s’arrêta, épia, l’aperçut dans le hamac, en train de dormir, le bras pendant au dehors, au-dessus du feuilleton qui était tombé sur le plancher. La face était légèrement inclinée du côté de la porte, les yeux fermés, les cheveux mêlés, dans un grand sourire de béatitude.

Dona Severina sentit le cœur lui battre avec violence et recula. La nuit précédente, elle avait rêvé de lui. Depuis le matin, la figure du jeune homme se présentait à ses regards comme une tentation diabolique. Elle recula encore, revint de nouveau, le regarda pendant deux, trois, cinq minutes ou plus. On eût dit que le sommeil donnait à l’adolescence d’Ignace