Page:Machado de Assis - Quelques contes.djvu/165

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— Vous allez entendre le récit d’une belle action.

— Elle ne vaut guère la peine qu’on en parle, interrompit Fortunato.

— Guère la peine ! vous en jugerez par vous-même, Madame, insista le médecin.

Il raconta l’aventure de la rue Dom-Manoel. La jeune femme écouta, surprise. Involontairement, elle étendit la main vers son mari, en lui serrant le poignet, souriante et reconnaissante, comme si elle venait de faire la découverte de son cœur. Fortunato haussait les épaules, mais écoutait, intéressé. Ensuite, il conta lui-même la visite que le blessé lui avait faite, avec tous les détails, attitudes, gestes, paroles embarrassées : « un pauvre diable, en somme ». Et il riait beaucoup pendant son récit. Ce n’était pas le rire de la duplicité, qui est évasif et oblique. Son rire, à lui, était jovial et franc.

— Singulier homme ! pensa Garcia.

Maria Luiza s’attrista de l’ironie de son mari ; mais le médecin lui rendit son contentement antérieur en recommençant à lui parler du dévouement et des rares qualités d’infirmier de Fortunato ; « si bon infirmier que si, quelque