Page:Machado de Assis - Quelques contes.djvu/233

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

je versai une somme à l’hôpital, etc., trente-deux contos, en tout. Je fis encore élever un mausolée au colonel, et je confiai le travail, qui fut exécuté tout en marbre, à un Napolitain qui, après être resté ici jusqu’en 1866, alla, je crois, mourir au Paraguay.

Les années passèrent, mes souvenirs sont devenus ternes et diffus. Je pense de temps à autre au colonel, mais sans les affres des premiers jours. Tous les médecins à qui j’ai soumis son cas sont tombés d’accord pour me dire que sa mort était certaine, et tous étaient surpris qu’il eût résisté si longtemps. Il se peut qu’involontairement j’aie exagéré les descriptions que je leur fis ; mais la vérité, c’est qu’il était condamné indépendamment de cette fatalité…

Adieu, cher Monsieur. Si vous trouvez que ces notes ont quelque intérêt, récompensez-m’en aussi en me faisant élever un tombeau de marbre, sur lequel vous ferez graver cette épitaphe, qui est une variante au divin sermon sur la montagne : « Bienheureux ceux qui possèdent, parce qu’ils seront consolés. »