Page:Machado de Assis - Quelques contes.djvu/273

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III


Évariste fit un sursaut, et vit en face de lui le domestique auquel il avait remis sa carte. Il se leva en hâte ; Marianna se réfugia dans son cadre, qui pendait du mur, et où il la vit de nouveau, vêtue à la mode de 1865, tranquille sous sa coiffure d’apparat. Comme il arrive dans les rêves, la pensée, les gestes et les actes n’avaient point été mesurés à l’étalon habituel du temps. La vision avait peut-être duré cinq ou six minutes, le temps nécessaire pour que le domestique portât la carte et revînt avec l’invitation d’entrer. Pourtant Évariste conservait l’impression des caresses de la jeune femme, et, par une heureuse concession du temps, il avait réellement revécu trois heures de sa vie, surgies des années 1869 à 1872. Toute son aventure s’était levée de l’abîme des ans, avec ses anciennes jalousies de Xavier et les mots de par-