Page:Machado de Assis - Quelques contes.djvu/346

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viendras un jour, quand ce ciel immense s’ouvrira pour en laisser descendre les âmes de la nouvelle vie. Et tu me retrouveras tranquille ici. Va.

Ahasvérus. — Je saluerai de nouveau le soleil ?

Prométhée. — Celui-là même qui se couche : soleil ami, œil des temps, qui jamais plus n’abaissera sa paupière. Fixe-le donc si tu le peux.

Ahasvérus. — Je ne puis.

Prométhée. — Tu le pourras un jour, quand les conditions de la vie auront changé. Alors ta rétine bravera l’astre sans péril, parce que tout ce qu’il y a de meilleur dans la nature se concentrera dans l’homme futur : énergie et délicatesse, scintillance et pureté.

Ahasvérus. — Jure-moi que tu ne mens pas.

Prométhée. — Tu verras bien si je mens.

Ahasvérus. — Parle, mais parle donc… dis-moi tout.

Prométhée. — La description de la vie ne vaut pas la sensation de la vie. Cette sensation s’imposera prodigieusement à toi. Le sein d’Abra-