Page:Machado de Assis - Quelques contes.djvu/52

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le traitait de débauché et de perfide, et déclarait que l’aventure était connue de tous. Camille eut peur, et, pour détourner les soupçons, il espaça ses visites chez Villela. Celui-ci se plaignit. Camille donna comme excuse une passion frivole de jeune homme. Sa candeur dégénéra en astuce. Ces intervalles se prolongeaient, et ses visites cessèrent entièrement. Peut-être entrait-il en cela un peu d’amour-propre, le désir de se soustraire aux affabilités du mari, pour diminuer la noirceur de sa propre conduite.

Ce fut à cette époque que Rita, défiante et craintive, courut chez la tireuse de cartes pour la consulter sur la véritable cause de la conduite de Camille. Nous avons vu que la cartomancienne lui rendit la confiance, et que le jeune homme la gronda. Les semaines passèrent, Camille reçut encore deux ou trois lettres anonymes, si passionnées qu’elles ne pouvaient être un avertissement vertueux ; elles laissaient plutôt deviner le dépit caché de quelque prétendant. Ce fut l’opinion de Rita, qui formula cet aphorisme en d’autres termes : « La vertu est paresseuse et avare ; elle ne dépense ni temps ni papier. Seul l’intérêt est actif et prodigue. »