Page:Machado de Assis - Quelques contes.djvu/55

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menacé précédemment. Villela était peut-être au courant de tout. Le fait seul d’avoir suspendu ses visites, sans motif apparent, à peine sous un prétexte futile, devait confirmer le reste. Camille marchait, inquiet et nerveux. Il ne relisait plus le billet ; mais les paroles, qu’il savait par cœur, se présentaient immobiles à ses regards ; ou encore, et l’impression était pire, elles lui étaient murmurées à l’oreille par la voix même de Villela : « Viens immédiatement chez nous ; j’ai besoin de te parler sans retard. » Ainsi prononcées, par la voix de l’autre, elles prenaient un ton de mystère et de menace. « Viens immédiatement. » Pourquoi ? Il était près d’une heure ; Son émotion croissait de minute en minute. Il imagina tant et tant ce qui allait se passer qu’il finit par le voir et y croire. Positivement il avait peur. Il se demanda s’il irait armé, considérant que, s’il s’était trompé, il ne perdrait rien, en recourant à cette précaution utile. Immédiatement, il rejeta cette idée, mécontent de lui-même ; et il alla, pressant le pas, dans la direction de la place de la Carioca, pour prendre un fiacre. Il y monta, et, suivant ses ordres, la voiture partit au grand trot.