Page:Machado de Assis - Quelques contes.djvu/92

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de la première fleur. Il ne savait s’il devait partir ou rester.

Depuis cinq semaines qu’il demeurait dans cette maison, la vie était toujours la même : sortir le matin avec Borges, courir les audiences et les études de notaires, porter en hâte du papier timbré au distributeur, aux greffiers, aux officiers ministériels. Il rentrait le soir, dînait, et se retirait dans sa chambre jusqu’à l’heure du souper. Après le repas, il allait dormir. Borges ne lui donnait aucune intimité dans la famille, qui ne se composait, du reste, que de dona Severina ; et il la voyait seulement trois fois par jour, aux heures de réfections. C’étaient cinq semaines de solitudes, de travail, sans attrait, loin de sa mère et de ses sœurs, cinq semaines de silence : car il ne parlait qu’une fois ou l’autre dans la rue. À la maison, il se taisait.

— Attends un peu, pensa-t-il un jour, je vais décamper pour ne plus revenir.

Il n’en fit rien. Il se sentit agrippé et enchaîné par les bras de dona Severina. Jamais il n’en avait vu d’aussi beaux et d’aussi jeunes. L’éducation qu’il avait reçue ne lui permit pas