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REMEDE DE FORTUNE XVII

C'est ainsi que la chute foudroyante de Pierre de la Broce, le favori du roi Philippe le Hardi, qui fut pendu en juin 1278 ', donne au trouvère Jean Moniot de Paris l'occasion d'écrire son Ditelet de Fortune 2 , et que le même événement inspire, à la même époque, à quelque poète anonyme un Dialogue entre Fortune et Pierre de la Broche par devant dame Raison ; . Certains arguments qui paraissent là se retrouveront sous la plume de Machaut, sans qu'il soit toutefois nécessaire d'admettre que celui-ci soit allé les chercher ici ; il est douteux même qu'il ait seulement connu ces productions éphé- mères. Mais il se souvenait certainement du passage du Roman de la Rose où Jean de Meun, bientôt après avoir pris la plume de la main de Guillaume de Lorris, consacre une vaste digression à Fortune, dont il démontre, à l'aide d'exemples tirés de l'histoire ancienne et contemporaine, l'inconstance et l'injustice, et dont il décrit longuement le lieu de résidence redoutable et merveilleux . Il connaissait probablement aussi le Roman de Fauvel dont le deuxième livre (de 1 3 14) est en première ligne consacré à cette même étude du rôle que dame Fortune, selon la volonté divine, doit remplir dans l'humanité et dont l'auteur, Gervais du Bus, pour- suit, par conséquent longtemps avant Machaut, le même but que celui-ci '. Ensuite ce sont les Dits de Fortune

1. Ch.-V. Langlois, dans Y Histoire de France de Lavisse, III, 2 (1901), p. 104-106.

2. Jubinal, Nouv. Recueil de contes etc., I (i83g), p. 195-198; A. Dinaux, Trouvères artésiens, III (1843), p. 334 ss.

3. Edité par Monmerqué et Michel, dans le Théâtre français au moyen âge (1839), p. 208-21 5.

4. Ed. F. Michel, I (1864), p. 160-229. D'après certains vers du Dialogue, l'auteur de celui-ci paraît déjà avoir connu l'œuvre de Jean de Meun qui lui serait donc antérieure. Il semble même y faire une allusion directe.

5. Dans la seule édition imprimée de ce poème, celle de Pey {Jahrbuch fUr rotnanische und englisclie Litcratitr, VIII, 1866,

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