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LXV1 INTRODUCTION

après d'humbles prières. Hélas ! Ce fut une malheu- reuse épreuve. Le gerfaut, après s'être assez bien com- porté d'abord, montra bientôt des dispositions à l'in- constance : symbole des amantes volages, il abandonnait facilement son maître. Il finit même par se jeter un jour sur un chat-huant, oiseau « lait, vil et puant » que nul noble oiseau de chasse ne daignerait poursuivre. Après de vains efforts pour le reprendre, Guillaume, honteux des bas instincts du gerfaut, renonce à lui définitivement.

Un jour qu'assis dans un verger, il songeait au cas d'une dame qui, pareille à son gerfaut, abandonnerait son mari ou son amant pour un indigne, et comme il prêtait l'oreille aux exhortations de Raison, il fut dis- trait par une verdière que le hasard lui livra : c'était jadis la proie préférée de son alérion. Or, voici qu'au même instant, un oiseau de proie fond sur son poing, et s'y pose. A sa surprise, Guillaume reconnaît le cher alérion qu'il a jadis perdu. Le doute n'est pas possible : l'oiseau répond à son nom, et il porte encore à la patte une perle que Guillaume y a jadis fixée. Aussitôt, ils reprennent leurs anciennes amours. L'explication allé- gorique de cette aventure et un épilogue où l'auteur se nomme terminent ce long poème.

Si sommaire qu'elle soit, cette analyse permet de reconnaître dans le Dit de V Alérion les mêmes élé- ments que nous avons remarqués déjà dans les œuvres précédentes : le souci de raconter des aventures per- sonnelles ou soi-disant telles ; — un certain étalage d'érudition ; - le goût de l'allégorie; - et des préoccu- pations didactiques. Ce dernier caractère est ici très frappant. Le Dit de V Alérion est un Art d'Amour : il enseigne comment on conquiert l'amour et comment on le conserve ; il établit le code des lois qui doivent régir les rapports entre dame et amant et définit leurs devoirs mutuels; tout particulièrement, il apprend à

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