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LE DIT DE L ALERION LXVII

l'homme raisonnable à se consoler de la perte ou de la trahison de sa dame. Ce n'est pas une répétition de ÏArt d'aimer d'Ovide ou de celui du Roman de la Rose : le poète y donne le résultat de ses propres observations et un tableau curieux des mœurs galantes dans les milieux courtois du xiv e siècle.

Jamais l'influence des études savantes de Machaut ne s'était fait sentir ni ne se fera sentir plus nettement que dans le Dit de V 'Alerion. Les réflexions philosophiques y abondent, et les développements scolastiques, les discussions, subtiles et minutieuses, y sont prolongées indéfiniment. Il semble que la clarté de la langue et la netteté du style en ont souffert.

C'est le procédé habituel de Machaut que d'étayer de preuves particulières ses préceptes généraux : il tire ici les unes de son expérience personnelle, d'autres de ses lectures, d'autres enfin d' « exemples », c'est-à-dire d'anecdotes ou de courtes nouvelles.

Pour ce qui est de l'expérience personnelle de Ma- chaut, Tarbé a pu se demander avec raison s'il ne faudrait pas voir dans le Dit de l'Alerion le tome pre- mier de « confessions » dont le Voir dit formerait le second. On ne peut répondre avec précision. Pourtant l'analogie d'autres œuvres, le Remède de Fortune, le Roy de Navarre, le Confort d'Ami, invite à croire que ÏAlerion repose sur quelque réalité. De plus, si le poète avait inventé ses récits de toutes pièces, ils eussent été, semble-t-il, plus flatteurs pour son amour-propre, et nous sommes donc porté à admettre que Machaut, tout chanoine qu'il fût, a pu courir quelques-unes des aventures dont il se fait le héros. Toutefois ses peintures sont ici plus vagues que dans le Roy de Navarre, les traits de la vie réelle plus rares et moins marqués que dans le Remède de Fortune.

Par contre, Machaut a largement étalé dans son Dit de r Alerion ses connaissances littéraires et scientifiques.

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