Page:Madame de Mornay - Memoires - tome 1.djvu/186

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sieurs qui vouloient abuzer de la ditte assemblée contre luy ; et sy puis-je dire avec vérité qu’il ne désiroit rien plus qu’en estre déchargé, comme il parut depuis ; et de [vrai[1]] vérité, son naturel estant de faire plaisir à un chacun, ceste charge ne luy pouvoit qu’apporter de la fascherie, en un estat nécessiteux. Et pour le regard de ses affaires, il est certain qu’en quatorze ans de service, il ne se trouvera point qu’il ait mis un denier en sa bourse, acquité une dette, ny acquis un pied de terre. Au contraire, on a admiré depuis comment il pouvoit faire, car il ne venoit rien au Roy de Navarre de Languedoc et Dauphiné ; toute la Guienne delà l’Isle estoit disposée par M. de Turenne ; et quant au patrimoine de S. M., il estoit totalement saysy, tellement qu’il ne restoit autres finances que celles de Xaintonge et Poictou, dont on ne tenoit pas la moitié, et n’y levoit on que les tailles seulles et quelques proffitz qui venoient de la mer ; et touteffois la maison du Roy alla tousjours son train accoustumé, les officiers bien paiés, grand nombre de gentilzhommes extraordinairement entretenuz, les garnisons ne perdoient un jour, quattre centz chevaux payés de mesme dedans les garnisons qui estoient pretz à toutes occasions, et autant d’harquebuziers à cheval, qui estoit le fondement des heureuses cavalcades que faisoit le Roy de Navarre ; l’artillerie au besoin ne demeuroit point, et se faisoit une infinité de voiages tant de-

  1. Ce mot est à la marge dans le manuscrit de la Sorbonne, le manuscrit de la Bibliothèque impériale porte, ainsi que l’édition de M. Auguis : « à la vérité, »