Page:Madame de Mornay - Memoires - tome 1.djvu/56

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ville,) ung sien clerc se vint offrir à luy fort volontairement, disant avoir moyen de le faire sortir par la porte St Martin, parce qu’il y estoit connu pour y avoir esté de garde ordinaire autrefois ; il en fut bien ayse, et, comme il fut à bas, s’aperçut qu’il n’avoit que des pantoufles, et le pria prendre des souliers, ne luy semblant propre pour faire un voyage ; mais il n’en fit cas, et aussy ne l’en voulut il importuner. Le malheur voulut que la porte St Martin n’ouvroit point ce matin là, dont furent contrainctz d’aller à la porte St Denis, où le dit clerc n’avoit point de congnoissance ; et après divers interrogatoires on les laissa aller, ayant respondu en somme qu’il estoit de Rouen, clerc d’ung procureur, et qu’il s’en alloit voir ses parens pendant les vacations. Mais quelqu’un, s’estant advisé des pantoufles du clerc, jugea que ce n’estoit pas pour aller loing, et que c’estoit un catholique Romain qui donnoit voie à ung huguenot. Ainsi laschèrent quatre harquebusiers après eux qui les arrestèrent près de la Villette entre Paris et St Denis. Soudain accoururent chartiers, carreyeurs et plastriers du fauxbourg et des plastrières et carrières prochaines en grant furie. Dieu le sauva de leurs coups et de ce premier abord ; mais comme il pense les adoucir de paroles, ilz le traînent vers la rivière. Le clerc commencea à s’estonner, et jureoit de fois à autre que monsieur du Plessis n’estoit point huguenot ( en ces mesmes motz) ; quelquefois l’appeloit monsieur de Buhy, ne se souvenant plus qu’il s’estoit dit clerc d’un procureur, comme ilz avoient arresté ensemble, et leur maison estoit prou connue es environs de Paris.