Page:Madeleine de Scudéry - Clélie, histoire romaine - Volume 01.pdf/252

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de Rome, quand ie ſerois aſſez heureux pour apprendre que ie ſerois d’vne naiſſance proportionnée aux ſentimens que i’ay dans le cœur, Clelius me refuſeroit Clelie, comme il la refuſe à mon Riual. Mais helas ! ie ſuis meſme bien eſloigné de cét eſtat là ! & puis que ie ne ſçay qui ie ſuis : & que ſelon toutes les apparences ie ne le ſçauray iamais. Cependant i’aime Clelie, ie l’aime ſans eſperance, & ie l’aime meſme auec la reſolution de ne le luy dire point, & de ne murmurer pas ſi elle s’irrite d’eſtre aimée de moy, en cas qu’elle deuine la paſſion que i’ay pour elle : iugez donc apres cela mon cher Amy, ſi ie n’ay pas ſuiet d’eſtre melancolique. Pour moy, luy dis-ie, qui ſuis perſuadé que la trop grande prudence eſt bien ſouuent inutile en amour ; ſans conſiderer tout ce que vous conſiderez, ie ferois diuerſes choſes : car ie