Page:Madeleine de Scudéry - Clélie, histoire romaine - Volume 01.pdf/74

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autant à vous que ie l’eſtois à Carthage, ie vous prie de m’aprendre ce qu’eſt deuenuë Clelie, & ce qu’eſt deuenu ſon Rauiſſeur, contre qui ie vous vy hier ſur ce Lac l’Eſpée à la main ? Helas mon cher Aronce, reprit Adherbal en ſoûpirant, le Rauiſſeur de Clelie apres m’auoir mis en l’eſtat où vous me voyez, fit ramer ſi diligemment, qu’il ſe déroba bien toſt à ma veuë : car comme mes Gens me virent bleſſé, il ne voulurent point m’obeïr, lors que ie leur commanday de ne laiſſer pas de faire ramer aueque force pour ſuiure Horace : & ils aimerent mieux ſonger à la conſeruation de ma vie, qu’à me ſatisfaire, quoy qu’ils l’ayent peut-eſtre plus expoſée qu’ils ne penſent en ne m’obeïſſant pas. Car enfin mon cher Aronce, auiourd’huy que ie ſuis en lieu où ie n’ay point de raiſons qui m’obligent à deſguiſer mes ſentimés,