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LE CHAT

Dans ce rayon de lune ; vous y verrez plus clair… Là ! tournez doucement…

(Tyltyl tourne le Diamant ; aussitôt, un long frémissement agite les branches et les feuilles. Les troncs les plus anciens et les plus imposants s’entr’ouvrent pour livrer passage à l’âme que chacun d’eux renferme. L’aspect de ces âmes diffère suivant l’aspect et le caractère de l’arbre qu’elles représentent. Celle de l’Orme, par exemple, est une sorte de gnome poussif, ventru, bourru ; celle du Tilleul est placide, familière, joviale ; celle du Hêtre, élégante et agile ; celle du Bouleau, blanche, réservée, inquiète ; celle du Saule, rabougrie, échevelée, plaintive ; celle du Sapin, longue, efflanquée, taciturne ; celle du Cyprès, tragique ; celle du Marronnier, prétentieuse, un peu snob ; celle du Peuplier, allègre, encombrante, bavarde. Les unes sortent lentement de leur tronc, engourdies, s’étirant, comme après une captivité ou un sommeil séculaire, les autres s’en dégagent d’un bond, alertes, empressées, et toutes viennent se ranger autour des deux enfants, tout en se tenant autant que possible à proximité de l’arbre dont elles sont nées.)
LE PEUPLIER, accourant le premier et criant à tue-tête.

Des Hommes !… De petits Hommes !… On pourra leur parler !… C’est fini le Silence !… C’est fini !… D’où viennent-ils ?… Qui est-ce ?… Qui sont-ils ?…