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Page:Magasin d'Éducation et de Récréation, Tome XIII, 1901.pdf/40

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LA (IRAN DE FOR fil en se dispersant sur la plaine ?... Quon ne l’oublie point, la vitesse de l’éléphant est prodigieuse, et un cheval au galop ne saurait la dépasser. « 11 faut fuir... fuir à l’instant !... affirma Khamis en s’adressant au Portugais. — Fuir !... » s’écria Urdax. Et le malheureux trafiquant comprenait bien que ce serait perdre, avec son matériel, tout le produit de l’expédition. Mais à demeurer au campement, le sauve­ rait-il et n’était-ce pas insensé que de s’obs­ tiner à une défense impossible ?... Max Huber et John Cort attendaient qu’une résolution eût été prise, décidés à s’v sou­ mettre, quelle qu’elle fût. Cependant la masse se rapprochait, et avec un tel tumulte qu’on ne parvenait guère à s’entendre parler. Le foreloper répéta qu’il fallait s’éloigner au plus tôt. « En quelle direction ? demanda Max Huber. — Dans la direction de la forêt. — Et les indigènes ?... — Le danger est moins pressant là-bas qu’ici », répondit Khamis. Que cela fût sûr, comment l’affirmer ?... Toutefois, il y avait, du moins, certitude qu’on ne pouvait rester à cette place. Le seul parti pour éviter l’écrasement, c’était de se réfugier à l’intérieur de la forêt. Or, le temps ne manquerait-il pas ?... Deux kilomètres à franchir, alors que la harde n’était qu’à un tout au plus !... Chacun réclamait un ordre d’Urdax, ordre qu’il ne se résolvait pas à donner. Enfin il s’écria : « Le chariot... le chariot !... Mettons-le à l’abri derrière le tertre... Peut-être sera-t-il protégé... — Trop tard, répondit le foreloper. — Fais ce que je te dis !... commanda le Portugais. — Comment ?... » répliqua Khamis. En effet, après avoir brisé leurs entraves, sans qu’il eût été possible de Jes arrêter, les bœufs de l’attelage s’étaient sauvés, et, affolés, couraient même au-devant de l’énorme

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troupeau qui les écraserait comme des mouches. Quand Urdax vit cela, il voulut recourir au personnel de la caravane : u Ici, les porteurs !... cria-t-il. — Les porteurs ?... répondit Khamis. Rappelez-les donc, car ils prennent la fuite... — Les lâches ! » s’écria John Cort. Oui, tous ces noirs venaient de se jeter dans l’ouest du campement, les uns emportant des ballots, les autre chargés des défenses. Et ils abandonnaient leur chef en lâches et aussi en voleurs ! II n’y avait plus à compter sur ces hommes. Us ne reviendraient pas. Ils trouveraient asile dans les villages indigènes. De la caravane restaient seuls le Portugais et le foreloper, le Français, l’Américain et le jeune indigène. « Le chariot... le chariot !... » répéta Urdax, qui s’entêtait à le garer derrière le tertre. Khamis ne put se retenir de hausser les épaules. Il obéit cependant et, grâce au con­ cours de Max Huber et de John Cort, le véhi­ cule fut poussé au pied des arbres. Peut-être serait-il épargné, si la harde se divisait en arrivant au bouquet de tamarins ?... Mais cette opération dura quelque temps, et, lorsqu’elle fut terminée, il était manifes­ tement trop tard pour que le Portugais et ses compagnons pussent atteindre la forêt. Khamis le calcula, et ne lança que ces deux mots : « Aux arbres ! » Une seule chance s’offrait : se hisser entre les branches des tamarins afin d’éviter le premier choc tout au moins. Auparavant Max Huber et John Cort s’intro­ duisirent dans le chariot. Se charger de tous les paquets de cartouches qui restaient, assu­ rer ainsi le service des carabines s’il fallait en faire usage contre les éléphants, et aussi pour la route du retour, ce fut fait en un instant avec l’aide du Portugais et du fore­ loper, lequel songea à se munir de sa hachette et de sa gourde. En traversant les basses régions de l’Oubanghi, qui sait si ses compa­ gnons et lui ne parviendraient pas à gagner les factoreries de la côte ?...