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G

JULES VERNE

Ce fut au pied de l’un des tamarins que les fèro un quartier d’antilope grillé sur les char- | bons, le biscuit de mer dont nous sommes deux amis et le Portugais s’assirent pour le largement approvisionnes, et nos quartauts de souper, que leurapporta le petit garçon, après avoir été préparé par un des indigènes auquel madère du Cap...

— Auquel on pourra mélanger quelques étaient dévolues les fonctions de cuisinier. Pendant ce repas, les langues ne chômèrent gouttes de ce rio limpide qui court à travers pas

plus que les mâchoires. Manger n’emla plaine », observa le Portugais. Et il montrait un affluent— de l’Oubanghi, péche point de parler, lorsqu’on n’v met pas sans doute — dont les eaux claires coulaient trop de hâte. De quoi s’entretint-on ?... Des incidents de l’expédition durant le parcours à un kilomètre de là dans l’ouest du tertre. Le campement s’acheva sans retard. L’ivoire vers le nord-est ?... Point. Ceux qui pouvaient fut empilé par tas à proximité du chariot. se présenter au retour étaient d’un intérêt Les attelages vaguèrent autour des tama­ plus actuel. Le cheminement serait long rins. Des feux furent allumés çà et là avec le encore jusqu’aux factoreries de Libreville bois mort tombé des arbres. Le foreloper — quinze à seize cents kilomètres — ce qui s’assurait que les divers groupes ne man­ exigerait cinq ou six semaines de marche. Or, quaient de rien. La chair d’élan et d’antilope, dans cette seconde partie du voyage, qui sait ?... fraîche ou séchée, abondait, et d’ailleurs les avait dit John Cort à son compagnon, auquel chasseurs la pouvaient renouveler aisément. il fallait mieux que de l’imprévu, de l’extra­ L’air se remplit de l’odeur des grillades, et ordinaire. Jusqu’à cette dernière étape, depuis les

chacun fit preuve d’un appétit formidable que confins du Darfour, la caravane avait redes­ justifiait cette demi-journée de marche.

Il va sans dire que les armes et les muni­ cendu vers l’Oubanghi, après avoir franchi les tions étaient restées dans le chariot, — quel­ gués de l’Aoukadèbé et de ses multiples ques caisses de cartouches, des fusils de affluents. Ce jour-là. elle venait de s’arrêter à chasse, des carabines, des revolvers, excel­ peu près sur le point où se croisent le ving­ lents engins de l’armement moderne, à la tième méridien et le huitième parallèle. « Mais maintenant, dit Urdax, nous allons

disposition du Portugais, de Khamis, de John suivre la direction du sud-ouest...

Cort et de Max lluber, en cas d’alerte.

— Et cela est d’autant plus indiqué, répon­ Le repas devait prendre fin une heure après. L’estomac apaisé, il s’agirait de dormir, et, la dit John Cort. que, si mes yeux ne me trom­ fatigue aidant, la caravane ne tarderait pas à pent pas. l’horizon du sud est barré par une forêt dont on 11e voit l’extrême limite ni à l’est être plongée dans un profond sommeil.

Toutefois, le foreloper la confia à la sur­ ni à l’ouest.

— Oui... immense ! répliqua le Portugais.

veillance de quelques-uns de ses hommes, qui devaient se relever de deux heures en deux Si nous étions obligés de la contourner par heures. En ces lointaines contrées, il y a l’est, des mois s’écouleraient avant que nous toujours lieu de se garder contre les êtres l’eussions laissée en arrière !...

— Tandis que par l’ouest ?...

malintentionnés, à deux pieds comme à quatre

— Par l’ouest, répondit Urdax, et sans trop pattes. A cet égard, Urdax ne manquait pas de prendre toutes les mesures de prudence. Agé allonger la route ni s’écarter de sa lisière, de cinquante ans, vigoureux encore, très nous rencontrerons l’Oubanghi aux environs entendu à la conduite de ces expéditions, il des rapides de Zongo. était d’une extraordinaire endurance. De

— Est-ce que de traverser cette forêt

même, Khamis, trente-cinq ans, leste, souple, n’abrégerait pas le voyage ?... demanda Max solide aussi, de grand sang-froid et de grand lluber.

— Oui... d’une quinzaine de journées do

courage, offrait toute garantie pour la direction des caravanes à travers l’Afrique.

marche.