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— Je serai très heureux d’être un des premiers à féliciter Mlle Violette et son fiancé, déclara-t-il.

Pour un amoureux déconfit, on ne pouvait être plus philosophe. Mais, sans doute, la soudaine passion du Corse n’avait-elle été qu’une lubie.

Rue Anatole-de-la-Forge, ils trouvèrent le salon vide. Le banquier s’étonna.

— Les amoureux devraient être là, dit-il. Il serait extraordinaire que Roland eût manqué à sa visite quotidienne.

Il sonna pour s’informer. Mais Mme Sarmange parut aussitôt.

C’était une excellente personne, très effacée et parfaitement incapable de s’émouvoir. Elle acceptait, avec une admirable égalité d’humeur les événements, bons ou mauvais, et cela seul expliquait qu’elle eût pu conserver, à travers l’existence mouvementée du banquier, l’inaltérable sérénité de ses traits.

— Violette est un peu en retard, déclara-t-elle paisiblement. Elle a éprouvé un gros chagrin, Roland vient de nous quitter pour un mystérieux voyage, décidé à l’improviste.

— Un voyage ! s’exclama le banquier. Roland est parti en voyage ! Qu’est-ce que c’est que cette histoire ?

— Je l’ignore. Mais il faut que quelque sérieux motif…

— Fichtre, oui !…

Flavien Sarmange s’interrompit. Violette entrait, très pâle, les yeux encore rouges et gonflés. Elle devait avoir beaucoup pleuré, et ses traits exprimaient une vive inquiétude.

Elle répondit à peine à la respectueuse courbette de Borsetti.

D’ailleurs, son père coupait court aux politesses.

— Pourquoi Roland est-il parti ? Tu dois le savoir, toi !

— Il est appelé brusquement en province pour une affaire excessivement importante.