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Sarmange, Violette. Mais ses yeux ne semblaient voir que cette dernière. Ils se fixaient sur elle, hagards, affolés, désespérés et suppliants.

Cela n’avait duré que quelques secondes. Nul — hormis, peut-être, les deux savants — n’avait eu le temps de s’apercevoir de l’émoi du gorille, quand un grand cri étrange, un cri dont les intonations n’avaient rien d’humain et qui, pourtant, était fait de syllabes humaines, retentit, glaçant l’assistance de stupeur et d’épouvante.

— Violette !

Ç’avait été une plainte désespérée, une clameur de bête à l’agonie, rugissement rauque déchirant la gorge d’où il s’échappait.

Violette entendit et, brusquement réveillée de sa douloureuse songerie, crut être le jouet d’une imagination. Il était si invraisemblable que le gorille eût prononcé son nom !

Effrayée, néanmoins, à cause de la visible surexcitation du gorille, elle pâlit et se rejeta en arrière.

Dans la loge, tous, avaient également pâli et tous s’étaient brusquement levés — le banquier Pasquale Borsetti, se dressant derrière les deux femmes, comme pour les protéger. Pâle et résolu, le Corse avait vivement plongé sa main dans une de ses poches, y cherchant sans doute une arme.

L’attitude du gorille justifiait ce geste. Elle était effrayante. Évidemment pris de folie, il venait de se précipiter contre le manteau d’Arlequin et mesurait du regard la hauteur qui le séparait de l’avant-scène. Il allait escalader, bondir…

Toute la salle, debout, hurlait d’effroi.