Page:Magre - Isabelle la grande.djvu/22

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Tantae molis erat hispanicam colligire gentem.

Enhardis par des succès inespérés, les chrétiens reprirent confiance, répondirent à l’appel de leurs chefs et se pressèrent assez nombreux autour d’Alonso el Catolico (739-757) pour lui permettre de reconquérir les Etats de Biscaye, une partie de la Navarre et la Galice jusqu’au Duero. Ségovie et Avila furent pris d’assaut. Salamanque, Astorga, Léon demandèrent à se rendre et ouvrirent leurs portes sans combat. A la mort d’Alonso el Catolico, les Asturies étaient reconquises. L’un des successeurs de ce prince, Alonso el Casto (795-843), eut l’audace de se présenter devant Mérida qu’il mit à sac (835). Ces triomphes furent pourtant traversés de quelques revers. Sans cesse les territoires étaient dévastés par les incursions des armées musulmanes et chrétiennes. Cependant Alonso el Magno (866-910) parvint à joindre la Galice et Léon aux Asturies et constitua un beau royaume dont Oviedo devint la capitale. Mais les fruits de ses conquêtes furent compromis par un partage entre ses trois fils (913). La désunion des princes ajoutait encore à leur faiblesse respective. D’ailleurs, à mesure que de petits États se reformaient avec les débris de l’ancienne monarchie visigothe, leurs maîtres semblaient professer à l’égard de leurs voisins des sentiments de jalousie comparables à la haine que leur inspiraient les Arabes, et le sang était aussi souvent versé pour régler des querelles intestines que pour combattre l’Infidèle.

L’œuvre de délivrance en eût peut-être souffert si le clergé ne fût intervenu. Les gens d’Église n’avaient pas été les derniers à se jeter dans la mêlée et à réclamer leur part de périls et de gloire. L’épée, la lance et la hache brillaient aux mains des évêques de préférence à la crosse. Grâce à ce zèle ardent, la cause de la patrie se confondit avec celle de la foi, et la Croix, symbole de rédemption dressé en face du croissant, devint le nouveau labarum autour duquel se groupèrent laïques et religieux. Après de cruelles vicissitudes, la crise intestine fut conjurée et, en l’année 932, le jeune royaume put célébrer la victoire de Simancas remportée par Ramiro III (912-950) sur le Khalife Abd er Rahman.

La Castille, reconquise peu après le Léon, fit longtemps partie de ce royaume et ne devint indépendante qu’à la suite de partages dont les conséquences désastreuses ont été signalées déjà. Les grands s’agitaient, se querellaient, se battaient, quand El Mansour, le célèbre Hadjib (généralissime) de Hicham III, les mit d’accord en proclamant la guerre sainte. Il entra en Castille, ravagea les campagnes, pilla les