Page:Maillard de Marafy - Grand dictionnaire international de la propriété industrielle, livraison 1 à 3.djvu/30

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« Attendu, dit l’arrêt, que la Société Pouillier-Longhaye (la défenderesse) ne prouve pas que Philibert Vrau et Ce aient abandonné aucune des marques par eux revendiquées, et les aient, à un moment donné, laissées à l’entière disposition du commerce ; que Philibert Vrau et Ce justifient, au contraire, de l’usage constant et de la possession continue de ces marques, de leur intention formelle d’en conserver la propriété exclusive, et de leur volonté manifeste de les protéger contre les usurpations. » (C. de Douai, 1er avril 1881. — Voy. Vrau c. Pouillier-Longhaye.)

La tolérance, poussée aussi loin que possible, ne constitue pas à elle seule l’abandon, même quand l’imitateur aurait exposé, à côté du légitime propriétaire de la marque, dans une grande Exposition, et aurait déposé cette marque depuis dix ans. (Trib. civil de la Seine. — Dupont c. Caussin, 17 avril 1879. — Voy. Dupont c. Caussin.) Le motif donné avec raison par le tribunal est que « l’intérêt est la mesure des actions ».

Dans une autre affaire, où la tolérance était également opposée comme fin de non-recevoir, le même tribunal explique sa pensée :

36. — « Attendu que la tolérance de la maison Bouasse-Lebel, alors qu’une contrefaçon restreinte ne lui causait qu’un faible préjudice, ne lui a pas fait perdre le droit de poursuivre cette contrefaçon, le jour où elle a pris des proportions plus étendues. » (Trib. civil de la Seine. — Bouasse-Lebel c. Mayaud frères et Adry. — Ann. XXII, 12.) La doctrine du jugement a d’autant plus de poids, il importe de le noter, que l’instance a été suivie jusqu’en cassation, avec gain de la maison Bouasse-Lebel devant toutes les juridictions. (Voy. Bouasse-Lebel c. divers.)

37. — La tolérance dépasse-t-elle trente ans, cette circonstance ne saurait pas davantage, à elle seule, impliquer abandon. Ainsi jugé, même en matière correctionnelle, par la Cour d’appel de Paris, en date du 8 janvier 1876, dans l’espèce suivante : La femme Lemit, prévenue de contrefaçon des marques de l’Eau des Carmes, ayant posé les conclusions suivantes : « Dire que l’absence de poursuite pendant plus de trente ans équivaut à un abandon de la part d’Amédée Boyer », ces conclusions furent repoussées par la Cour comme inadmissibles. (Voy. Eau des Carmes. — Boyer c. Lemit.)