Page:Mairet - Marca.djvu/71

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« M. Nariskine a une voix profonde et vibrante qui semble donner une valeur extraordinaire à ses moindres paroles. Il y eut un moment de silence qui éveilla l’attention même du monsieur très décoré ; quant à moi, je me disais déjà que M. Nariskine était tombé subitement amoureux fou de ma belle marraine y ce qui du reste n’avait rien de bien étonnant : tous les hommes qui rapprochent semblent plus ou moins amoureux d’elle ; j’étais même en train de faire un roman extraordinairement ridicule à ce propos quand elle me dit :

— Marca, conduis donc monsieur Nariskine à la galerie pour qu’il voie si son tableau est placé à son gré… C’est ma fille adoptive, monsieur, ajouta-t-elle en guise de présentation.

« M. Nariskine fixa sur moi des yeux pleins d’étonnement. Dans la visite que ma marraine lui avait faite, elle ne lui avait pas parlé de moi, — ce qui, certes, n’a rien de bien surprenant ; son étonnement me semblait exagéré et en somme peu poli ; aussi ce fut avec un peu d’impatience que je lui dis :

— Vous ne voulez donc pas m’offrir le bras, monsieur ? — Décidément je suis un peu gâtée !

— Pardon, mademoiselle, pardon… Et il se mit à traverser la salle de bal comme un homme dans un rêve.

— Mais vous connaissez donc le chemin ?…